De la préhistoire au XXe siècle, rapportée par M. BAUDOUX

M.BAUDOUX est décédé en décembre 2004, il nous a laissé un important travail d’historien dont une partie est ici reproduite.

Les peuples heureux n’ont pas d’histoire a-t-on coutume de dire. Tel devrait être sans doute le cas de CHATEAU GARNIER, puisque jusqu’à présent peu d’historiens se sont intéressés à notre commune, hormis le Père Aristide FAYOUX qui lui a réservé diverses chroniques partielles dans le mensuel inter-paroissial « Le Blé qui lève » ; Mr EYGUN dans son volumineux ouvrage sur l’abbaye de la REAU, et Mr HELIOT, dans sa plaquette sur le Manoir de Monchandy.
Pourtant CHATEAU GARNIER, au fur et à mesure que l’on recherche dans les documents d’époque ou dans des études documentées, apparaît comme un lieu chargé d’histoire, même si les témoignages visibles de son passé ont par la faute des hommes presque entièrement disparu, et que les contours des périodes antérieures à l’an 1 000 de notre ère se fondent dans le flou de la préhistoire et de l’imprécision de l’histoire elle-même.
Aux temps préhistoriques, la région couverte de forêts et de brandes, abrite quelques groupes établis le long de la rivière du Clain. C’est d’abord l’époque de la pierre taillée, dont nous retrouvons de nombreux vestiges dans nos champs. L’homme est alors « un loup pour l’homme » et lutte contre les animaux. Lui succède l’époque de la pierre polie, où les habitants activent leur emprise sur l’environnement : ils labourent, élèvent, tissent, érigent des blocs de pierre et commencent à se regrouper. A l’âge du bronze et à l’âge du fer, nos lointains ancêtres fabriquent des armes et des outils. Des liaisons plus lointaines s’établissent entre eux et leurs voisins des grottes du Chaffaud de CHARROUX et de LUSSAC.

A partir de cette époque, apparaissent chez nous les premières forges qui, au cours des siècles à venir laisseront un nom à des lieux-dits : Les Petites Forges, Les Grandes Forges, Le Mineret, Les Minières, La Chaufferie… Parsemé de blocs ferreux ou latéritiques, le sol de notre commune devient une zone d’exploitation du fer, dont on relève encore les traces sur le terrain, ou que l’on découvre actuellement par observation aérienne.

Quelques six siècles avant J.C., l’arrivée des Celtes ou Gaulois s’accompagne, au sein de l’ethnie Pictonne, d’un développement de l’agriculture : le milieu rural s’adonne au commerce et aménage des voies d’accès et de circulation où se déplacent les chars. Mais c’est surtout avec la conquête romaine (58-51 avant J.C.) qui marquera la transformation de notre village et de ses hameaux. Cette transformation s’amplifie avec la paix romaine et l’instauration du Christianisme aux siècles suivants. Les noms de Saint-Martin et de Saint-Hilaire de Poitiers sont connus dans toute la contrée. Sous les Mérovingiens (481-752) notre région va connaître de nombreux bouleversements dont l’impact sur les agglomérations est important : passage des Vandales vers l’Espagne, installation des Wisigoths en Aquitaine, unification de la Gaulle par Clovis, rattachement au royaume de Neustrie peuplé surtout de Gallo-romains, invasion arabe stoppée à Poitiers en 732. Sous les Carolingiens (752-987) les fermes (villas) bénéficient de l’autorité du pouvoir laquelle se manifeste par de nombreux capitulaires, l’ouverture d’écoles et l’envoi sur place des « Missi-Dominici ». A cette période, se constituent les grands domaines qui ont laissé divers noms chez nous : LA FA, LE COURTEIL, VILLENEUVE, MAISONNEAU…
Pendant le Moyen-âge, le territoire de la paroisse de CHATEAU GARNIER est une constellation de petits fiefs relevant de familles nobles de l’endroit ou d’ailleurs. Le paysan acquitte les redevances à son seigneur, au Clergé et notamment aux Abbayes environnantes qui commencent à se multiplier. Celles de LA REAU, de CHARROUX, de SAINT CYPRIEN de POITIERS, notamment bénéficient de nombreuses menses dans notre paroisse. Le système féodal se prolongera jusqu’au XIXème siècle, les serfs obtenant progressivement du seigneur, grâce à la signature de Chartes, une diminution des corvées et droits antérieurs.
En 1096, sous la tutelle de Messire René DE CORAL, Baron de MAZET, est construite l’église qui sera malheureusement démolie en 1887 pour faire place à l’église actuelle. Comme dans la plupart des paroisses, l’édification de l’église a accompagné celle du château féodal au lieu-dit « LE PIN ». Le château s’agrandira aux siècles suivants pour comprendre quatre tours d’angles, un corps central de bâtiments, des douves et une fuie. Il comportait un souterrain, depuis longtemps muré, tandis que diverses galeries souterraines d’alentours servaient probablement au stockage des vivres en cas de siège. L’une de ces galeries part de la propriété de Mr MENNEGUERRE pour rejoindre l’emplacement de l’ancienne église. Il ne reste plus aujourd’hui que des traces de l’agencement féodal, la maison de Maître actuelle, construite sur les fondations de l’ancien château, date de 1822. La fuie a été démolie vers les années 1930 et les matériaux de récupération ont servi à construire les maisons du bourg.
Quant au Manoir de MONCHANDY, encore parfaitement conservé, il n’apparaît dans les archives qu’au début du XVème siècle. Un fait ressort toutefois de l’ensemble des archives : si MONCHANDY, MOISEAU et leurs dépendances ont pu parfois, au fil des ans, être réunis sous la mouvance d’un même seigneur, la châtellenie, elle, restera jusqu’à la période révolutionnaire rattachée au site du PIN, où se succéderont diverses grandes familles nobles telles que les LEMAYE, les La COSTE MESSELIERE, les SAINT GEORGES de VERAC…

Pendant le Moyen-âge, le territoire de la paroisse de CHATEAU GARNIER est une constellation de petits fiefs relevant de familles nobles de l’endroit ou d’ailleurs. Le paysan acquitte les redevances à son seigneur, au Clergé et notamment aux Abbayes environnantes qui commencent à se multiplier. Celles de LA REAU, de CHARROUX, de SAINT CYPRIEN de POITIERS, notamment bénéficient de nombreuses menses dans notre paroisse. Le système féodal se prolongera jusqu’au XIXème siècle, les serfs obtenant progressivement du seigneur, grâce à la signature de Chartes, une diminution des corvées et droits antérieurs.

Mais CHATEAU GARNIER, comme les communes proches CIVRAY et GENCAY, va subir les vicissitudes de la guerre de Cent Ans, puis des guerres de religion. Incendies, pillages, vols, massacres se succèdent alors dans une zone appauvrie. Les Protestants seront nombreux à CHATEAU GARNIER où s’exerceront par la suite des abjurations forcées, puis interviendra l’interdiction du culte protestant dans la commune, suivant un arrêt, en 1634, du Tribunal des grands jours siégeant à POITIERS. Par ailleurs, l’église réformée du VIGEANT, refoulée sur son annexe du COURTEIL, sera définitivement dissoute en 1665. A la veille de la Révolution, l’organisation administrative et religieuse de CHATEAU GARNIER est relativement complexe. Si le curé est encore nommé par l’Abbé de CHARROUX, la paroisse dépend hiérarchiquement de l’Archiprêtre de GENCAY ; sur les plans administratif et judiciaire, de la châtellenie et de la sénéchaussée de CIVRAY ; pour les impôts, de l’élection de POITIERS.

En 1789, les trois ordres de CHATEAU GARNIER établissent et signent en commun un cahier de doléances dénonçant les privilèges et réclamant des réformes. Mais tout au long de la période révolutionnaire, il n’ y aura pas chez nous contrairement à d’autres communes voisines, d’opposition déclarée aux pouvoirs successifs en place, même quand la Convention débaptisera le nom de CHATEAU GARNIER en celui de GARNIER MONTAGNE, pour effacer toute trace de l’Ancien Régime, composera le vocabulaire révolutionnaire, et poursuivra les prêtres non jureurs opposés à la Constitution civile du Clergé. L’un des prêtres déportés et morts sur les pontons de ROCHEFORT, l’Abbé BONNET, curé de SAINT MARTIN L’ARS, serait natif de CHATEAU GARNIER.

Au XIXème siècle, se poursuit dans la commune, comme dans tout le MONTMORILLONNAIS, le défrichement systématique de brandes qui permettra le développement des surfaces agricoles, l’extension de l’élevage, parallèlement à l’augmentation du commerce et l’organisation des grandes foires du 22. CHATEAU GARNIER dépasse alors avec ses villages et hameaux le chiffre de 1100 habitants. Il bâtira son école de garçons et sa Mairie en 1868, son école de filles en 1883, l’enseignement étant jusqu’alors dispensé dans des locaux appartenant à des particuliers, l’église et le presbytère seront reconstruits à partir de 1888.

L’histoire de CHATEAU GARNIER au XXe siècle est trop proche des contemporains pour être ici développée : guerre de 14-18, guerre de 39-45, guerre d’Indochine de 45 à 54, conflit algérien terminé en 1961, l’ont marquée. En particulier l’explosion du machinisme, les transformations sociales, politiques ou religieuses, ont créé chez nous, comme ailleurs, des conditions de vie nouvelles en matière d’agriculture, d’habitat, d’emploi, d’environnement. Ainsi l’histoire, notamment la petite histoire des petits bourgs comme le nôtre, se doit de répondre aux trois éternels problèmes : qui sommes-nous ? D’où venons-nous ? Où allons-nous ? En ce qui concerne le passé de CHATEAU GARNIER, il reste un champ immense à défricher pour les futurs historiens ou chercheurs, à travers les archives et les études des spécialistes de toutes époques. Cette recherche pourrait être un jour parachevée par des fouilles ou prospections méthodiques sur le site historique du PIN, de l’Eglise, du cimetière, et des maisons avoisinantes du Haut Bourg, où dorment nombre de vestiges des siècles passés. Ce serait des retrouvailles de notre patrimoine disparu.